Le goût de l’eau

Santé des lacs et plan régional des milieux humides et hydriques

Avec les journées qui allongent, la nature qui éclot de partout, on se prend à rêver : que nous réserve l’été 2022? Le goût de l’eau, de baignades, d’activités nautiques et de jardins épanouis se fait sentir. Généralement, on se réjouit de l’annonce d’un été chaud… mais à condition que l’eau soit au rendez-vous! Souvenons-nous du très bas niveau de nos lacs et rivières à la fin de l’été 2021. Météo Média prévoit un été chaud, pour la cinquième année consécutive, du jamais vu au Québec[1]. Dans un tel contexte, comment s’assurer de préserver la santé de nos lacs et de nos milieux hydriques, ces richesses collectives essentielles?

Nos ressources en eau : une responsabilité collective

Avant même le début de l’été, la municipalité de Saint-Félix-de-Valois a demandé à ses citoyen·nes de réduire leur consommation en eau[2]. On sait que le lac Berthier était aux prises avec un problème d’algues bleues à la fin de l’été dernier. Le lac Mondor est en bonne santé, mais certains éléments sont préoccupants, notamment la récente diminution de la zone de vie du lac (moins d’oxygène; plus de phosphore). Le nouveau comité consultatif en environnement (CCE) de la ville de Saint-Jean-de-Matha, comprenant des représentants des Associations des lacs Noir, Mondor, Berthier et Vert, s’est réuni pour la première fois le 30 mai dernier et il s’y est dégagé une volonté ferme de poser des actions concrètes pour les générations futures.

Lancement du Plan régional des milieux humides et hydriques de la MRC de Matawinie

Toutes les municipalités régionales de comté (MRC) du Québec devaient déposer pour la mi-juin leur Plan régional des milieux humides et hydriques (PRMHH). Voilà un projet mobilisant et porteur pour assurer la santé de nos lacs et cours d’eau! Le PRMHH de la MRC de Matawinie a été adopté le 18 mai, un mois avant la date butoir, ce qui témoigne de l’importance accordée à la protection de l’environnement par les responsables de ce plan régional.

Le 28 avril dernier, les Association des lacs Mondor et Noir ont participé à la consultation publique, à Rawdon, et ont pu constater le professionnalisme du responsable du PRMHH, M. David Deslaurier (aménagiste). Étaient également présent·es Félix Nadeau-Rochon (directeur adjoint du service d’aménagement de la MRC) et Audrey Boisjoly (mairesse de Saint-Félix-de-Valois et directrice de la Commission aménagement et environnement de la MRC), qui ont démontré un engagement sincère dans la préservation de nos milieux naturels. Lors de cette consultation, l’Association de protection du lac Mondor a déposé un court mémoire, incluant quelques recommandations[3].

Avant de faire un survol des faits saillants de notre tout nouveau PRMHH, rappelons que les milieux humides et hydriques (MHH) que sont nos lacs et cours d’eau sont d’une valeur inestimable non seulement pour leur grande beauté, mais aussi parce qu’ils rendent des services écologiques importants aux collectivités[4].

Priorisation de l’eau dans nos interventions sur le territoire

La MRC de Matawinie est riche de plus de 44 000 milieux humides et hydriques. Bonne nouvelle : ces lacs et cours d’eau sont majoritairement en bonne santé. De plus, un grand nombre d’entre eux sont catégorisés « priorité 1 », ce qui signifie qu’ils sont considérés de grande qualité, donc majeurs à conserver. Compte tenu de l’objectif gouvernemental de « zéro perte nette », notre MRC est donc en bonne position puisqu’il vaut mille fois mieux préserver nos MHH plutôt que de les restaurer ou de les compenser (deux options beaucoup plus coûteuses et beaucoup moins bénéfiques). Afin de prendre soin de ceux-ci, le PRMHH propose une nouvelle approche : « intégrer la conservation des milieux humides et hydriques (MHH) à la planification de l’aménagement du territoire, en favorisant un développement durable et structurant »[5].

Pendant des décennies, la planification du développement du territoire ne tenait pas assez compte de la présence des MHH à cause d’une faible connaissance à la fois de ceux-ci et de leurs caractéristiques et bienfaits. Également, nous ne prenions pas assez en compte les impacts des activités humaines sur les milieux naturels[6]. C’est pourquoi le PRMHH s’est concentré, en priorité, sur les MHH situés dans des zones pressenties de développement.

Ainsi, lors du dépôt d’un futur projet de développement, les élu·es, autant au municipal, au régional qu’au provincial, pourront s’appuyer sur le PRMHH de la MRC de Matawinie pour repérer les MHH concernés et leur priorité de conservation, ce qui aura un impact important sur la prise de décision. Par exemple, des MHH de priorité 1 ont été identifiés aux abords du lac Mondor. Ainsi, cette identification des MHH en amont du processus décisionnel impose une vigilance accrue aux décideurs afin d’assurer le maintien de la qualité des lacs et cours d’eaux permanents et intermittents.

Les lacs de tête et la connectivité

Dans le cas du lac Mondor, la gestion par bassin versant du PRMHH s’avère d’autant plus intéressante. En effet, le lac Mondor se situe à la tête du bassin versant de la rivière Bayonne, qui alimente toute une série de lacs en aval avant de se jeter dans le fleuve St-Laurent. Puisque l’apport en eau des lacs de tête provient principalement des eaux souterraines, le développement autour de ces lacs est d’autant plus délicat. Ces lacs plus fragiles ont une capacité de support encore plus primordiale à respecter. Ils ne peuvent pas accueillir un trop grand nombre d’habitations ou d’activités humaines. Il en va de la santé de toute une série de lacs et cours d’eau en aval.

Enfin, le PRMHH, dans son approche globale, propose de développer des corridors écologiques[7] dans la MRC, notamment afin d’améliorer la qualité et la répartition des habitats des espèces en péril dépendantes des MHH.
Ainsi, le grand héron, un habitué du lac Mondor il y a une vingtaine d’années, avait presque disparu de notre paysage aquatique. Nous avons eu la chance d’en apercevoir quelques spécimens l’été dernier. Espérons que nos efforts collectifs pour prendre soin des milieux humides et hydriques essentiels à ces espèces fragiles nous permettront de cohabiter de nouveau!

[1] Pour plus de détails, voir « Aperçu exclusif : trois mots vont marquer l’été au Québec » publié le 31 mai sur le site de Météo média.
[2] Voir, à ce sujet, l’article « Brigade bleue et prévention : Une consommation d’eau extrêmement élevée à Saint-Félix-de-Valois » (Néomédia, 18 mai 2022).
[3] https://www.lacmondor.com/medias/communications/
[4] Pour un rappel des divers rôles des milieux humides et hydriques, consultez l’Infolettre Hiver 2022.
[5] Extrait tiré de la présentation du PRMHH sur le site Internet de la MRC de Matawinie.
[6] Pour mieux comprendre les impacts des humains sur le domaine vital des espèces animales, consultez la chronique « Le pic, la chouette et le triton » dans la présente Infolettre.
[7] Pour découvrir la valeur inestimable des corridors écologiques, consultez la chronique « Histoire de corridors et de réseaux » de l’Infolettre Printemps 2022.

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